Typographie & Civilisation
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Histoire de l'imprimerie
Claude Garamond
     

CHAPITRE PREMIER

Les défauts de l’écriture manuscrite

ES PREMIER REPROCHES concernant la forme des lettres tient au fait que le dessin de bon nombre de consonnes ne se distinguent les unes des autres que par des points diacritiques.

La forme des lettres

C’est ainsi que la lettre peut se lire (Kha’), (Hha’), (Ja’), compliquant de fait la clarté de la lecture. Cette confusion est renforcée par le problème lié au fait que certaines lettres comme le Dal () ou le Ra’ (), ne peuvent être liées à la lettre qui les suit. Cette situation complique singulièrement la tâche du lecteur qui souvent ne sait où commence un mot, ni même où il finit; et ceci d’autant plus que les espacements entre les mots, même en imprimerie, ne sont pas normalisés.

On peut également reprocher à l’écriture arabe la diversité de formes des lettres, formes qui varient selon la place de la lettre dans le mot. Beaucoup en ont ainsi quatre: isolée, finale, médiane et initiale, à l’instar de la lettre ‘Ayn: ,,,.

Liquidiation judiciaire

Mais le plus grand défaut de l’écriture arabe est le problème des voyelles courtes qui ne sont indiquées que fort rarement par des points diacritiques. La lecture devient alors assez complexe: “Comment l’oeil peut-il saisir en même temps et avec précision les lettres avec ce qu’il y a dessous et ce qu’il y a dessus, comment peut-il ensuite le faire passer aux nerfs du cerveau et ceux-ci enfin aux nerfs de la langue de façon saine et juste?” (Ali el-Garim). De fait, la vocalisation du texte ne se fait que pour le Coran, car les fautes sont à proscrire lors de la récitation de la parole de Dieu et dans les manuels scolaires élémentaires. En revanche, la grande majorité des imprimés, à commencer par les journaux et les livres, ne sont quasiment jamais vocalisés. Pour le lecteur c’est donc un véritable travail de reconstitution du sens qui doit s’opérer, ce qui a fait dire à Qasim Amin que “dans les langues occidentales on lit pour comprendre alors qu’en arabe il faut comprendre pour lire”.

Pour résumer cette idée essentielle, il est possible de citer deux chercheurs, à l’origine de projets de réforme de l’écriture, discutées au Congrès de l’Académie de Langue Arabe du Caire:

  • Abd al-Aziz Fahmi: “Il est impossible à aucun de ceux qui l’apprennent, même des meilleurs, jeunes et vieux sans exception, de lire une seule page de n’importe quel livre ou une colonne de n’importe quel journal, de façon continue, sans faire des fautes énormes ou moins graves, ou pour le moins sans s’arrêter à tout bout de champ et sans couper les liaisons entre les groupes de mots. Quand il lit, il est constamment occupé à aiguiser son regard et à tortuer son esprit afin de chercher à percevoir le sens de ce qu’il lit avant de lire, pour pouvoir lire; on le voit alors comme ravi en extase, ou comme celui qui a trop mangé et qui patiente: tantôt il écarquille les yeux tantôt il les ferme presque. Toutes sortes de défauts s’entremêlent dans sa bouche (...).”

  • Ali al-Garim: “En vérité, la lecture correcte est devenue pour nous un travail scientifique, précis, très compliqué; elle est devenue un art (une technique), un fardeau, pour tout dire une devinette; on ne peut lire l’arabe tel qu’il est actuellement si l’on n’est à la fois, linguiste, grammairien, spécialiste en morphologie et en syntaxe. Si l’on n’est pas tout cela en même temps, on est incapable d’être un lecteur ou un semblant de lecteur.”

Autres remarques

Il existe des reproche plus anecdotiques fait à la l’écriture arabe, comme l’absence de majuscules ou encore le fait que le 0 en chiffres indiens se réduit à la taille d’un point et se distingue donc très nettement de ses homologues ( vs ) ou que le ‘trois’ manuscrit s’écrit comme le ‘deux’ imprimé () ce qui peux être à l’origine de confusions génantes.